WP3 : Autonomie individualisée

L’autonomie individualisée (A. Petiau, A. Trenta)

Le dispositif d’étude cherchera à caractériser, par la mobilisation de méthodes mixtes (quantitative et qualitative), l’évolution de l’accompagnement à l’autonomie autour et pour les individus. Il s’agira autant de s’intéresser aux configurations d’acteurs dans l’accompagnement individuel qu’à leurs effets sur l’autonomie de ces mêmes acteurs et des individus accompagnés. Notre objectif est de qualifier et d’objectiver les transformations et variations des types de professionnels impliqués ainsi que la place et le rôle des proches-aidants caractéristiques des différents régimes. Il s’agira ici, à partir d’un traitement de grandes enquêtes de la statistique publique d’une part et d’entretiens et observations approfondies d’autre part, de proposer une analyse centrée sur l’autonomie « en actes ». L’analyse croisée des savoirs, des pratiques et des trajectoires des différents acteurs sociaux qui interviennent dans la conception et la réalisation du soin et/ou de l’accompagnement (professionnels, proches aidants et personnes en situation de dépendance) met en lumière la diversité des systèmes de normes avec lesquels les individus doivent composer pour donner un sens à leur activité et à leur identité.

Approche quantitative des configurations d’acteurs

L’approche quantitative a pour objectif de décrire les variations observées (dans le temps et l’espace) des configurations d’aide selon les lieux et modes de prise en charge (en institution et à domicile), les différents niveaux et type de dépendance et autant que faire se peut, dans le temps (en France à minima). Notre objectif est d’identifier les cas types de prise en charge en termes de configurations d’acteur propre à chacun des territoires infranationaux et d’en mesurer la variabilité[1]. 

La mobilisation de ces données a pour objectif de dresser un panorama quantitatif des variations dans l’accompagnement des individus du point de vue de l’intervention de professionnels et de la famille. On réalisera différentes typologies de configurations d’aide pour caractériser ces variations dans le temps, entre territoires et entre échelles (national/territorial). Les variations de ces typologies seront appréciées en lien avec les résultats des WP 1 et 2 et permettront d’objectiver réalité d’accompagnement et norme d’autonomie.
 
[1] A ce titre, pour la France, nous proposons de mobiliser les enquêtes suivantes : Handicaps-Incapacités-Dépendance[8] (HID) en institutions (1998) et en ménages ordinaires (1999) ; Handicap-Santé ménage[9] (2008) et institution (2009) ; Care[10] Ménages (2015) et Institutions (2016) qui seront traitées de façon complémentaire ou articulée. Pour le Canada nous proposons de mobiliser l’Enquête canadienne sur la santé des aînés (ECSA, 2019 et 2020), les enquêtes sur la participation et les limitations d’activités (EPLA) menée en 2001 et en 2006 puis les enquêtes canadiennes sur l’incapacité (ECI) de 2012 et 2017. En Allemagne nous proposons l’enquête German Ageing Survey (DEAS) et German Survey on Volunteering (FWS). Ce corpus d’enquête sera complété en lien avec les équipes nationales et en fonction de la disponibilité des sources. 

Approche qualitative de la réception des politiques, des instruments et des modalités d’exercice de l’autonomie

Cette seconde tâche propose d’étudier si et comment les acteurs et les dispositifs auxquels ils peuvent avoir recours, parviennent à maintenir une forme d’autonomie aux destinataires et aux aidants proches ou professionnels concernés. Comment les personnes se représentent-elles les politiques qui leur sont adressées ? Comment se représentent-elles l’autonomie et sa perte, entre capacitation, autonomie décisionnelle, de long-terme, de court-terme, etc ? S’approprient-elles les catégories de l’action publique ou construisent-elles leur autonomie en y résistant, en les articulant à d’autres ressources ou encore en les contournant ? Les différents régimes induisent-ils différentes manières de se représenter et de faire usage des politiques ? Quelles autres ressources, notamment informelles, les personnes et leurs proches mobilisent-elles pour agir sur leur autonomie ? L’enquête sera notamment attentive à saisir de quelles manières les instruments d’action publique sont signifiés et mobilisés concrètement par les personnes, en considérant leur appui éventuel sur des réseaux familiaux ou d’entraide entre proches. Ce volet permettra ainsi de mettre en perspective les continuités et discontinuités entre les caractérisations de l’autonomie dans les conduites ordinaires des personnes, au niveau de la concrétisation de leurs droits sociaux, et celles portées par les instruments et les professionnels.

On analysera le travail d’intervenants et la place accordée aux attentes des proches-aidants et à celles des destinataires (personnes en situation de handicap ou de dépendance liée à l’âge) en matière d’autonomie, en interrogeant les différentes parties prenantes intervenant dans la configuration d’aide. Il s’agira de conduire des entretiens semi-directifs approfondis auprès de plusieurs intervenant.es professionnels et proches aidant.es[1] qui interviennent auprès d’un même bénéficiaire afin de comprendre comment se mettent en place les configurations d’aide et comment elles viennent façonner la notion d’autonomie. Dans les espaces d’hébergement et d’accompagnement collectifs, les temps d’observation déjà mentionnées au 2.2.2.2 compléteront le dispositif d’enquête. Dans la mesure du possible, et en fonction des contraintes sanitaires, les personnes âgées et en situation de handicap seront aussi interrogées. Idéalement, on réalisera des observations de situations de travail variées, au sein des institutions et à domicile (en fonction des contraintes locales). Les coopérations avec les praticiens hospitaliers (hôpital militaire de Percy, CHU de Nantes, CHRU de Lille) permettront de partager les méthodologies et les contenus des enquête qualitatives auprès des praticiens hospitaliers dans le domaine de la mesure de la perte d’autonomie et de la réhabilitation fonctionnelle, mais aussi auprès des patients. En étudiant la relation et les configurations d’aide, on prêtera une attention au rôle du genre ainsi que des origines géographiques et sociales.
 
[1] Seront interrogés 3 configurations par terrain local (3) par pays (5). Des entretiens avec 2 professionnels à minima (en veillant à diversifier les secteurs sanitaire et social), 2 proches aidants seront menés auprès des 45 configurations d’aide.